Nouvelles normes du travail

Loi modernisant le régime de santé et de sécurité au travail en résumé

Impacts à prévoir sur les organisations

Le 6 octobre 2021, l’Assemblée nationale du Québec a adopté la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité au travail. Certains de ces changements pourraient avoir des impacts pour les organismes communautaires, en tant qu’employeur de travailleuses et de travailleurs. Les articles ci-après sont copiés, tels quels, du résumé disponible sur le site internet de la CNESST. Les parties surlignées sont des commentaires.

En vigueur depuis le 6 octobre 2021

Télétravail

L’emplacement où s’effectue le télétravail est considéré comme un lieu de travail au sens de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST). Ainsi, la LSST s’applique à la travailleuse ou au travailleur qui est en télétravail ainsi qu’à son employeur, sous réserve de dispositions qui ne seraient pas conciliables.

Ce qui veut dire que les lésions professionnelles et accidents de travail survenu en télétravail pourraient être reconnus par la CNESST et que l’employeur doit fournir un lieu de travail sécuritaire à la travailleuse-travailleur.

Prévention de la violence

Sur les lieux de travail, l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la protection de la travailleuse ou du travailleur exposé à une situation de violence physique ou psychologique, dont une situation de violence conjugale, familiale ou à caractère sexuel.  Dans le cas d’une situation de violence conjugale ou familiale, l’employeur est tenu de prendre ces mesures lorsqu’il sait ou devrait raisonnablement savoir que le travailleur est exposé à cette violence. 

Parmi les mesures à prendre : aménager le bureau pour assurer la sécurité, s’assurer de l’organisation du travail pour assurer la sécurité, utiliser des méthodes et des techniques visant à identifier, corriger et contrôler les risques de violence en milieu de travail, informer les travailleuses et travailleurs sur les risques liés à la violence, dont la violence conjugale.

L’employeur doit, avec l’accord de la travailleuse concernée, mettre en place un plan de sécurité individuel.

Le saviez-vous ? Une travailleuse-travailleur qui doit s’absenter du travail à la suite de violence conjugale ou à caractère sexuel a droit à une absence sans salaire (et sans perte de droit) d’un maximum de 26 semaines sur une période de 12 mois et pourrait avoir droit à 2 jours d’absence payés. 

À partir du 6 avril 2022

Régime intérimaire des mécanismes de prévention et de participation

Tous les établissements qui n’ont pas déjà de mécanismes de prévention et de participation dans leur milieu de travail devront mettre en place le régime intérimaire des mécanismes de prévention et de participation.

Les mécanismes de prévention mécanismes de prévention font référence au programme de prévention et, éventuellement, au plan d’action. 

Les établissements des groupes prioritaires 4, 5 et 6 comptant moins de 20 travailleuses et travailleurs doivent documenter par écrit l’identification des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs jusqu’à l’entrée en vigueur des dispositions réglementaires sur les mécanismes de prévention en établissement. 

Une représentante ou un représentant en santé et en sécurité  doit être désigné par les travailleurs dans tous les établissements de 20 travailleuses et travailleurs et plus.

Une agente ou un agent de liaison en santé et en sécurité doit être désigné par les travailleurs dans tous les établissements de moins de 20 travailleuses et travailleurs.

Les organismes communautaires sont visés par ces nouvelles dispositions et devront, eux aussi, procéder à un exercice d’identification des risques et nommer un.e représentant.e ou un.e agente, dépendamment de leur situation. Cependant, la date d’entrée en vigueur de cette mesure n’a pas encore été déterminée. Voir la section « à la date ou aux dates à fixer par le gouvernement » du présent document.

https://www.cnesst.gouv.qc.ca/fr/prevention-securite/organiser-prevention/faire-un-programme-prevention/identifier-risques-dans-milieu-travail

À partir du 6 octobre 2022

Accommodement raisonnable de retour au travail

Si aucune mesure de réadaptation ne permet au travailleur de reprendre son emploi ou un emploi équivalent, la CNESST détermine en collaboration avec le travailleur et l’employeur si un emploi convenable est disponible chez ce dernier. La CNESST évalue par la suite si la mise en place de mesures de réadaptation est nécessaire pour permettre au travailleur d’exercer l’emploi convenable disponible. Dans l’affirmative, la CNESST met en œuvre, en collaboration avec l’employeur et le travailleur, un programme de réadaptation professionnelle adapté.

La CNESST évalue, en collaboration avec l’employeur et le travailleur, le besoin d’un accommodement raisonnable pour réintégrer le travailleur chez son employeur, comme l’aménagement des tâches et la modification de l’horaire ou de l’organisation du travail. La CNESST est la seule à pouvoir déterminer si un accommodement raisonnable est nécessaire pour permettre au travailleur d’exercer un emploi convenable disponible chez l’employeur. Toutefois, l’employeur peut faire la démonstration que l’accommodement lui impose une contrainte excessive.

Si elle le juge nécessaire, la CNESST peut autoriser un retour progressif au travail et le soutien financier qui l’accompagne afin de faciliter la réintégration du travailleur chez son employeur.

La CNESST peut ordonner à l’employeur qui refuse de collaborer aux démarches de retour au travail ou de réintégrer le travailleur dans son emploi, un emploi équivalent ou un emploi convenable disponible malgré une décision à cet effet de lui payer une sanction administrative pécuniaire. Cette dernière est équivalente à l’indemnité de remplacement du revenu à laquelle le travailleur aurait pu avoir droit durant la période où l’employeur a été en défaut. Le montant de la sanction peut atteindre un maximum d’une année d’indemnité de remplacement du revenu. Ce montant est versé dans le Fonds santé et sécurité du travail.

Avant, l’employeur avait plus de pouvoirs de détermination quant à l’accommodement raisonnable. Maintenant la CNESST est la seule à pouvoir détermine si un accommodement raisonnable est nécessaire.

À partir du 1er janvier 2023

Retrait préventif de la femme enceinte ou qui allaite

Le retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite fait l’objet de protocoles élaborés et mis à jour par le directeur national de santé publique (DNSP). Ces protocoles permettent d’identifier les dangers et les conditions de travail qui y sont associées en milieu de travail. Le DNSP peut consulter tout expert ou organisme public pour l’élaboration et la mise à jour de ces protocoles.

Le Certificat visant le retrait préventif et l’affectation de la travailleuse enceinte ou qui allaite, dans le cadre du programme Pour une maternité sans danger est délivré par le professionnel qui effectue le suivi de grossesse ou le professionnel qui effectue le suivi postnatal. Il doit évaluer, conformément aux protocoles élaborés par le DNSP, que les conditions du travail de la travailleuse comportent des dangers physiques pour elle-même, à cause de son état de grossesse, pour l’enfant à naître ou pour l’enfant qu’elle allaite.

Si les dangers et les conditions du travail qui y sont associées ne sont pas identifiés par un protocole, le professionnel doit consulter un médecin chargé de la santé au travail ou le directeur de santé publique de la région dans laquelle se trouve l’établissement, ou la personne qu’il désigne.

Avant, le certificat était délivré par un médecin ou une infirmière spécialisée, le médecin responsable des services de santé de l’établissement ou la personne désignée par le directeur de la santé publique était consulté. Il n’y avait pas de référence au protocole établi par la direction de la santé publique. Quels seront ces protocoles ? Seront-ils plus restrictifs ou plus permissifs ? Ceux-ci auront quels impacts sur les retraits préventifs ?

Aux dates ou à la date fixées par le gouvernement (à venir, un jour)

Plan de prévention (plan d’action en prévention dans les établissements de moins de 20 travailleuses)

(En lien avec le Régime intérimaire des mécanismes de prévention et de participation à compter du 6 avril 2022)

Les établissements comptant moins de 20 travailleuses et travailleurs devront élaborer et mettre en application un plan d’action en prévention propre à leur établissement.

Ce plan d’action partage les mêmes objectifs que le programme de prévention qui s’adresse aux établissements d’au moins 20 travailleuses et travailleurs.

Ce plan d’action doit notamment prévoir :

  • l’identification des risques pouvant influer sur la santé des travailleuses et travailleurs de l’établissement, dont les risques chimiques, biologiques, physiques, ergonomiques et psychosociaux liés au travail, ainsi que de ceux pouvant toucher leur sécurité
  • les mesures et les priorités d’action permettant d’éliminer ou, à défaut, de contrôler les risques identifiés grâce à la hiérarchie des mesures de prévention et les échéanciers pour l’accomplissement de ces mesures et de ces priorités
  • les mesures de surveillance et d’entretien permettant de s’assurer que les risques identifiés sont éliminés ou contrôlés
  • l’identification des moyens et des équipements de protection individuels pour répondre aux besoins des travailleuses et travailleurs
  • la formation et l’information en matière de santé et de sécurité du travail

S’il existe un programme de santé au travail applicable à son établissement, l’employeur a l’obligation d’élaborer des éléments de santé dans son plan d’action.

Plusieurs organismes sont considérés comme un groupe prioritaire 6, il est recommandé de faire un programme de prévention mais celui-ci n’est pas obligatoire. De même qu’un comité ou une personne responsable de la prévention ne sont pas requis par la Loi. Si un comité de prévention est formé, une représentante en santé et en sécurité doit être désignée par les travailleuses. Outil: https://dacsg.qc.ca/index.php/373363?lang=fr 

Désigner une agente ou un agent de liaison en santé et en sécurité dans les établissements ayant moins de 20 travailleuses et travailleurs

Dans les établissements ayant moins de 20 travailleuses et travailleurs, une agente ou un agent de liaison est désigné par :

les associations accréditées et les travailleuses et travailleurs non représentés de l’établissement

Cette personne a pour fonction de :

  • coopérer avec l’employeur pour faciliter la communication des informations en santé et en sécurité du travail entre l’employeur et les travailleuses et travailleurs de l’établissement
  • collaborer à l’élaboration et à la mise en application du programme de prévention ou du plan d’action en écrivant ses recommandations à l’employeur
  • faire des recommandations écrites sur l’identification des risques dans le milieu de travail
  • porter plainte à la CNESST, si nécessaire

Les recommandations doivent être appliquées par l’employeur dans un délai de 30 jours. Une fois ce délai échu, l’agent de liaison peut porter plainte contre l’employeur à la CNESST.

L’agent de liaison est protégé par la Loi sur la santé et la sécurité du travail. L’employeur ne peut le congédier, le suspendre, le déplacer ou exercer des mesures discriminatoires ou de représailles à son égard ou lui imposer toute autre sanction pour le motif qu’il exerce ces fonctions.

Il doit participer à une formation dont le contenu et la durée sont déterminés par la CNESST. Il peut s’absenter de son travail le temps nécessaire pour exercer ses fonctions et pour participer à la formation déterminée par la CNESST.

À surveiller lorsque la date sera déterminée pour l’entrée en vigueur afin de déterminer si les organismes y sont obligés. Si oui, chaque organisme devra nommer, chaque année, une personne à ce rôle et une place aux recommandations devra être faite aux réunions du conseil d’administration.

Risques psychosociaux

L’employeur doit désormais s’assurer d’inclure, dans son programme de prévention ou dans son plan d’action, les risques psychosociaux liés au travail pouvant avoir une incidence sur la santé des travailleuses et des travailleurs. 

Cette démarche s’inscrit dans les mécanismes de prévention que sont le programme de prévention et le plan d’action en prévention. Le représentant en santé et en sécurité devra également faire des recommandations associées à ce type de risques.

À suivre, cela nécessitera une attention particulière et probablement des changements dans les politiques des conditions de travail ainsi que des discussions en équipe et avec les conseils d’administration.

RAPPEL  *** ENTRÉE EN VIGIEUR DEPUIS LE 1ER JANVIER 2019 ***

Les congés

  • Un salarié a droit à 3 semaines de vacances annuelles après 3 années de service.
  • Un salarié peut s’absenter du travail pendant 5 jours, dont 2 journées rémunérées, lors du décès d’un proche (conjoint, enfant, enfant du conjoint, père, mère, frère, sœur).
  • Un salarié n’a plus à justifier d’au moins trois (3) mois de service continu chez un même employeur pour bénéficier des congés pour cause de maladie, de don d’organes ou de tissus, d’accident, de violence conjugale, de violence à caractère sexuel ou d’acte criminel et certains congés de longue durée pour des raisons familiales ou parentales, à savoir les congés prévus aux articles 79.1 et 79.8 à 79.12 (art. 79.2 al. 1 et 79.16 al. 1);
  • Le salarié qui possède 3 mois de service continu peut s’absenter pendant 2 jours PAYÉS au cours d’une même année en raison d’une maladie, d’un accident, de violence conjugale ou de violence à caractère sexuel.
  • Le salarié qui compte au moins 3 mois de service continu peut bénéficier d’un maximum de 2 jours de congé payés, au cours d’une même année, pour prendre soin d’un parent ou d’une personne auprès de laquelle il agit comme proche aidant.

Définition de service continu : 12° « service continu » : la durée ininterrompue pendant laquelle le salarié est lié à l’employeur par un contrat de travail, même si l’exécution du travail a été interrompue sans qu’il y ait résiliation du contrat, et la période pendant laquelle se succèdent des contrats à durée déterminée sans une interruption qui, dans les circonstances, permette de conclure à un non-renouvellement de contrat.

Le service continu s’accumule également pendant la période au cours de laquelle se succèdent des contrats à durée déterminée, à la condition toutefois qu’on ne puisse conclure à un non-renouvellement de contrat lors d’une interruption de travail pendant cette période.

Congé pour interruption de grossesse

  • Si une interruption de grossesse survient avant le début de la 20e semaine de grossesse, la travailleuse a le droit de s’absenter jusqu’à 3 semaines, sans salaire.
  • Si une interruption de grossesse survient à partir du premier jour de la 20e semaine de grossesse, la travailleuse a droit, sans salaire, à un congé de maternité d’un maximum de 20 semaines. Pour les interruptions de grossesses survenues avant le 1er janvier 2021, le congé peut se terminer au maximum 18 semaines après l’événement. Elle a aussi droit à des prestations du Régime québécois d’assurance parentale (RQAP).
  • Les 2 parents peuvent aussi avoir droit à un congé de 5 jours. Ce congé doit être pris dans les 15 jours suivant l’interruption de la grossesse. Si la mère est déjà en congé de maternité, elle ne peut pas bénéficier de ce congé.

Le harcèlement psychologique et sexuel

La loi a été modifiée afin d’inclure, dans la définition du «harcèlement psychologique», le harcèlement sexuel ainsi que le harcèlement discriminatoire (fondé sur l’un des motifs énoncés à l’article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne).

Un salarié dispose d’un délai de 2 ans après la dernière manifestation de harcèlement pour déposer une plainte auprès de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). Dans une décision récente, le Tribunal administratif du travail a conclu que cette modification est d’application immédiate et qu’elle n’a pas pour effet de faire revivre un droit déjà éteint.

METTRE EN PLACE UNE POLITIQUE DE PRÉVENTION DU HARCÈLEMENT PSYCHOLOGIQUE OU SEXUEL ET DE TRAITEMENT DES PLAINTE

À compter du 1er janvier 2019, l’employeur doit adopter et rendre accessible pour ses personnes salariées une politique de prévention du harcèlement psychologique et sexuel et de traitement des plaintes, qui inclut un volet concernant les conduites qui se manifestent par des paroles, des actes ou des gestes à caractère sexuel.

Pour en savoir plus sur ce que devrait contenir cette politique, des outils sont à votre disposition :

Guide pour l’élaboration d’une politique de prévention en matière de harcèlement psychologique ou sexuel au travail et de traitement des plaintes

Modèle de politique en matière de harcèlement psychologique ou sexuel au travail et de traitement des plaintes

Le salaire et les conditions de travail

Le salaire peut être versé par virement bancaire sans que l’employeur ait à obtenir l’accord du salarié.

Un salarié ne peut bénéficier de conditions de travail moins avantageuses que celles d’autres salariés qui font le même travail dans le même établissement uniquement en raison de sa date d’embauche. Depuis le 11 juin 2018, le régime de retraite et les autres avantages sociaux font partie des conditions de travail qui ne peuvent faire l’objet d’une disparité de traitement. Toutefois, les disparités de traitement en vigueur avant cette date demeurent valides.

L’employeur et le salarié peuvent convenir de l’étalement des heures de travail sur une base autre qu’hebdomadaire sans que l’autorisation de la CNESST soit nécessaire. Certaines conditions s’appliquent.

Le refus de travailler

Un salarié a le droit de refuser de travailler plus de 2 heures au-delà de ses heures habituelles quotidiennes de travail. Celui qui n’a pas été avisé 5 jours à l’avance qu’il devrait travailler peut refuser de le faire. La loi précise que cette mesure ne s’applique pas à un travailleur agricole ni à un salarié dont la nature des fonctions exige qu’il demeure en disponibilité.

Autres modifications

Non-discrimination sur fondée sur une date d’embauche 

La distinction fondée sur une date d’embauche relativement à des régimes de retraite ou à d’autres avantages sociaux et qui affecte des salariés effectuant les mêmes tâches dans le même établissement est dorénavant interdite. Toutefois, les distinctions fondées sur une date d’embauche antérieure au 11 juin 2018 ne seront pas assujetties à cette nouvelle disposition.

La responsabilité de l’administrateur ou du dirigeant de la personne morale

Dans le contexte d’une poursuite pénale pour violation de la LNT par une personne morale ou ses représentants, l’administrateur ou le dirigeant de la personne morale sera présumé avoir commis lui-même une infraction, à moins d’établir qu’il a fait preuve de diligence raisonnable. Cela serait par ailleurs cohérent avec les modifications législatives quant à la responsabilité des administrateurs, en matière de santé et sécurité au travail.[i]


[i] https://www.lavery.ca/fr/publications/nos-publications/3077-lessentiel-des-changements-apportes-a-la-loi-sur-les-normes-du-travail.html

Déf. Service continu et explications : https://rver-montreal.com/wp-content/uploads/Service%20continu.pdf

Autre source consultée : https://langlois.ca/rappel-aux-employeurs-entree-en-vigueur-de-nouvelles-normes-du-travail-le-1er-janvier-2019/